Les compétences des chats sont surprenantes.
L’éthologue Patrick Pageat étudie leurs facultés d’apprentissage et leur communication avec l’homme.
De nombreuses études démontrent qu’une foule d’espèces animales sont, comme les humains, capables d’émotions, d’expression, d’abstraction et de résolution de problèmes. Curieux, habiles, inventifs, bavards, les chats le prouvent tous les jours.
Mais il aura fallu attendre les plus récentes recherches pour que leurs facultés soient mieux évaluées scientifiquement.
Au cours des six à huit premiers mois, toute une initiation aide le chaton à forger sa propre personnalité, développer ses compétences sociales et cognitives, élaborer peu à peu un comportement d’adulte.
C’est d’abord grâce à sa mère qu’il acquiert les bases de son éducation.
Avec elle, il saura comment se comporter et communiquer avec ses congénères, comment s’amuser avec les oreilles ou la queue de ses copains sans faire mal, comment déjouer les stratégies de ses proies pour se nourrir. Un apprentissage long et sophistiqué, fondé sur l’observation, l’imitation, l’adaptation est révélateur d’une intelligence opérationnelle bien élaborée.
L’intelligence des chats est adaptée à leurs besoins. Ni plus, ni moins. Ils ne l’exercent qu’en fonction d’un contexte précis – ici et maintenant – et pour répondre à une situation donnée : « j’ai faim », « j’ai envie de jouer », « je manque de tendresse ». Pour le reste, effectuer des opérations mentales abstraites et résoudre des équations à deux inconnues ne leur sert à rien. Selon Patrick Pageat, la grande différence entre les êtres humains et la plupart des autres espèces se situe donc là, dans notre aptitude spécifique à « décontextualiser » une réflexion, et à manier l’abstraction.
Mais attention : qui dit absence de langage articulé, verbal, abstrait, ne dit pas pour autant incapacité à communiquer. Bien au contraire ! Chez le chat, les facultés d’expression et de compréhension se révèlent même particulièrement perfectionnées. C’est bien pourquoi nous l’avons domestiqué ! Si nous y sommes parvenus, c’est surtout parce qu’il a su lui-même faire preuve de souplesse et de sociabilité pour s’adapter à nos comportements, notre vocabulaire, nos intonations.Encore faut-il qu’il ait grandi dans un environnement favorable, condition indispensable à son plein épanouissement futur, qu’il n’ait pas été arraché à sa mère trop tôt et qu’il ait eu des contacts positifs avec notre espèce dès sa cinquième semaine. S’il en est ainsi, il réunira un maximum de chances d’aiguiser ses potentialités. Il saura par exemple assimiler plusieurs dizaines de mots de vocabulaire, décrypter vos odeurs, mimiques et autres gestes. Mieux, souvent, que vos collègues ou votre conjoint !
Alors, à notre tour, pourquoi ne pas lui rendre la pareille ? Les chats ne se contentent pas de décoder nos fonctionnements, ils ont aussi leur mot à dire ! Chacune de leurs vocalises (ronronnements, feulements, miaulements aigus ou graves) exprime quelque chose et lorsque nous sommes seuls à leurs côtés, c’est bien à nous qu’ils s’adressent. Une fois captée notre attention, le regard (pupille dilatée ou fermée), les mouvements de queue ou d’oreilles (dressées, plates ou en chapeau de gendarme), le positionnement du corps (recroquevillé, sur le qui-vive ou alangui), délivrent des messages complémentaires qu’il nous appartient de déchiffrer. Il existe des lexiques et des ouvrages pour faciliter notre interprétation, mais rien ne vaut l’observation attentive et l’empathie. Nos amis, eux, parviennent bien à nous comprendre en se passant de dictionnaire.
Texte extrait de l’article de Marie-Sophie Bazin -